La vision artificielle s’impose comme un levier majeur pour l’industrie moderne, offrant des capacités de détection et de contrôle automatisés au cœur des lignes de production. Pourtant, développer des algorithmes performants dans ce contexte exige de surmonter plusieurs défis clés, notamment l’adaptabilité aux conditions variées des environnements industriels et la robustesse face aux évolutions constantes des chaînes de montage. Pour répondre à ces contraintes, les méthodes avancées d’apprentissage semi-supervisé, continu et multitâche deviennent indispensables. En parallèle, la combinaison des traitements d’image classiques et de l’intelligence artificielle profonde optimise la précision et la rapidité. Enfin, l’intégration de ces algorithmes dans l’industrie 4.0 bouleverse les processus, avec des enjeux techniques et humains majeurs.

Les enjeux majeurs liés à l’adaptabilité et à la robustesse des algorithmes en environnement industriel

Dans le contexte industriel, la variabilité des conditions réelles telles que l’éclairage, les angles de vue ou les matériaux pose un véritable défi à la robustesse des algorithmes de vision artificielle. Ces algorithmes doivent s’adapter dynamiquement à ces changements pour garantir une efficacité constante.

Ce qui complique encore la tâche, c’est la sensibilité forte des modèles aux paramètres de leur environnement d’entraînement. Modifier une caméra ou un angle, ou bien des conditions lumineuses, peut dégrader lourdement leurs performances en production. Cette fragilité limite malheureusement leur usage à grande échelle dans les ateliers où les chaînes de montage évoluent fréquemment.

Les systèmes doivent donc être conçus pour assurer une flexibilité tout en surmontant la complexité des ajustements nécessaires au déploiement sur le long terme. La Chaire Imagerie Matrox illustre bien cette problématique en développant des algorithmes polyvalents capables de s’adapter en temps réel à n’importe quel contexte industriel, un objectif stratégique du développement industriel moderne(1).

Les méthodes d’apprentissage semi-supervisé, continu et multitâche pour pallier le manque de données annotées

Les limites du classique apprentissage supervisé

L’apprentissage supervisé utilisé traditionnellement requiert des volumes massifs de données annotées, souvent des centaines de milliers voire millions d’images. Ces ensembles ne sont quasiment jamais disponibles en industrie, qui fait face à des collections limitées, mal équilibrées entre produits conformes et défectueux. Ce manque pèse lourdement sur la qualité et la robustesse des modèles.

Apprentissage semi-supervisé : maximiser l’efficacité avec peu d’annotations

Pour contourner ce frein, l’apprentissage semi-supervisé exploite judicieusement un petit nombre d’exemples annotés. Ceux-ci sont sélectionnés de manière dynamique, optimisant ainsi l’efficacité des réseaux de neurones profonds. Cette méthode diminue significativement à la fois le coût d’annotation et les efforts humains tout en conservant d’excellentes performances prédictives adaptées à l’industrie.

Apprentissage continu et multitâche : vers des algorithmes flexibles et polyvalents

L’apprentissage continu permet aux modèles d’évoluer en temps réel, s’ajustant sans réentraînement total aux changements d’environnement (variation de lumière, déplacement des pièces) et d’objectifs. Cela confère stabilité et maintien des performances dans la durée.

Par ailleurs, une méthode multitâche innovante vise à segmenter simultanément la scène industrielle pour isoler différents objets tout en extrayant des caractéristiques précises. Cette double capacité accélère la reconnaissance et accroît la précision du contrôle qualité, un progrès clé pour des systèmes industriels intelligents(1).

L’association des techniques classiques de traitement d’image et du deep learning pour optimiser la vision industrielle

Complémentarité des méthodes traditionnelles et modernes

Les techniques classiques telle que la morphologie mathématique ne sont pas remplacées par le deep learning mais restent complémentaires. Elles contribuent à accélérer les traitements et à renforcer la robustesse des algorithmes sur les images industrielles complexes.

Synergie entre rapidité, précision et adaptabilité

La combinaison des approches traditionnelles et du deep learning produit un équilibre optimal entre précision, adaptabilité et mise à jour aisée. Cette synergie est indispensable pour répondre aux contraintes très spécifiques des environnements industriels, où la vitesse de traitement et la flexibilité jouent un rôle clé.

Optimisation de la constitution des bases d’apprentissage

Les méthodes classiques sont également employées pour la pré-annotation automatique des bases d’images, réduisant ainsi drastiquement le temps et les coûts liés à la validation humaine. Cette étape facilite la création de jeu de données d’entraînement larges et représentatifs, incontournables à la qualité finale des modèles. De surcroît, un prétraitement soigné et l’intégration des expertises métier sont essentiels pour garantir une interprétabilité et une exploitation optimales des résultats(2).

Les outils logiciels et langages de programmation privilégiés dans le développement d’algorithmes de vision industrielle

OpenCV : flexibilité et communauté open-source

OpenCV s’impose comme une bibliothèque incontournable, open-source, supportant plusieurs langages (C++, Python, Java). Elle offre une large palette d’outils performants pour développer et tester des algorithmes adaptés aux contraintes industrielles, bénéficiant d’une vaste communauté active pour accompagner le développement.

HALCON : puissance et industrialisation avec langage dédié

À la différence d’OpenCV, HALCON est une solution commerciale spécialisée dans l’industrie, disposant d’une riche bibliothèque ainsi que de son propre langage, HDevelop. Cette configuration simplifie l’industrialisation et le prototypage rapide d’algorithmes complexes au sein d’un environnement dédié.

VisionPro : convivialité et efficacité professionnelle

VisionPro, développé par Cognex, cible les professionnels en offrant une interface intuitive et une suite d’outils complète pour la configuration des caméras et le contrôle qualité. Ce logiciel commercial met l’accent sur une utilisation rapide et fluide, facilitant la mise en œuvre des projets industriels.

Langages : C++ et Python au cœur du développement

Pour la programmation, C++ et Python constituent les choix prioritaires. C++ garantit la performance optimale et le contrôle bas niveau, indispensable pour certains traitements temps réel. Python essaye d’être choisi pour sa flexibilité, la richesse de son écosystème et sa rapidité de développement. Ces langages s’accompagnent parfois de langages spécifiques aux bibliothèques afin d’optimiser la conception d’algorithmes selon les exigences projet(2).

Caméras de vision artificielle industrielles capturant des détails précis dans un environnement contrôlé.
Caméras de vision artificielle industrielles capturant des détails précis dans un environnement contrôlé.

L’intégration des algorithmes de vision artificielle dans l’industrie 4.0 : impacts et perspectives

L’intégration de la vision artificielle dans les environnements industriels 4.0 vise à booster la productivité et à améliorer la qualité dans des chaînes de production connectées et en constante évolution. Ce processus impose d’importants défis d’adoption technique et organisationnelle autour du déploiement et de la maintenance des systèmes.

Les enjeux incluent la gestion du changement humain, notamment la formation approfondie des opérateurs, ainsi que la sécurité des données industrielles et le respect des normes juridiques telles que le RGPD. Pour garantir une implantation durable, ces aspects ne peuvent être négligés.

La collaboration homme-machine se transforme aussi, avec le développement de robots adaptatifs intelligents capables d’ajuster leur comportement en fonction de stimuli variés, augmentant ainsi la flexibilité et la réactivité des systèmes de production.

Enfin, la conjonction de la vision artificielle avec des technologies émergentes comme l’Internet des Objets (IoT) et la blockchain ouvre un horizon prometteur. Elle permet de construire des chaînes intelligentes, transparentes et efficaces, renforçant à la fois la traçabilité des produits, l’optimisation des ressources et la durabilité industrielle à long terme(3).

Sources

(1) etsmtl.ca - Algorithmes ajustés aux besoins de l’industrie, https://www.etsmtl.ca/actualites/algorithmes-ajustes-besoins-industrie

(2) polyprocesssolutions.fr - Programmation des systèmes vision industrielle : œil numérique qui révolutionne l’industrie, https://www.polyprocesssolutions.fr/Programmation-des-systemes-vision-industrielle-oeil-numerique-qui-revolutionne-industrie_fiche_95.html

(3) adcis.net - La vision par ordinateur au service de la transformation industrielle, https://www.adcis.net/fr/la-vision-par-ordinateur-au-service-de-la-transformation-industrielle